Il est courant de vivre, travailler ou investir au-delà des frontières. De ce fait, de plus en plus de familles se trouvent confrontées à une succession internationale. Lorsqu’une personne décède à l’étranger, possède des biens dans plusieurs pays, ou a plusieurs nationalités, le règlement de sa succession nécessite une attention particulière.
Quelles règles s’appliquent ? Peut-on choisir la loi de son pays d’origine ? Faut-il rédiger un testament spécifique ? Que se passe-t-il en matière de fiscalité ? Autant de questions auxquelles il est important de répondre pour éviter conflits ou blocages au moment du décès.
Qu’est-ce qu’une succession internationale ?
Une succession est dite « internationale » dans plusieurs cas de figure :
- le défunt résidait dans un pays différent de celui dont il avait la nationalité ;
- le patrimoine du défunt est réparti entre plusieurs pays ;
- il avait plusieurs nationalités ;
- les héritiers vivent dans un autre État que celui où s’ouvre la succession.
Quelle est la loi applicable à une succession internationale ?
Les principes avant et après le règlement européen
Avant 2015, le droit civil français appliquait deux règles :
- biens immobiliers : loi du pays où se trouvent les biens ;
- biens mobiliers : loi du dernier domicile du défunt.
Depuis l’entrée en vigueur du règlement européen n°650/2012 (applicable depuis le 17 août 2015), ces règles ont été unifiées pour les successions internationales dans les pays de l’Union européenne (hors Irlande, Danemark et Royaume-Uni).
Désormais, la loi applicable est celle de la résidence habituelle du défunt au moment de son décès.
Il est aussi possible d’opter pour la loi de sa nationalité, par testament (article 22 du règlement).
Choisir la loi applicable à sa succession (professio juris)
Un expatrié peut formuler dans son testament le souhait d’appliquer la loi de son pays de nationalité. Ce choix est stratégique, notamment si l’on souhaite bénéficier des principes français comme la réserve héréditaire.
Conditions pour exercer cette option :
- être ressortissant ou résident d’un État membre ;
- mentionner expressément cette volonté dans un testament, même olographe.
Exemple : une Française vivant aux États-Unis peut choisir la loi française pour sa succession afin de protéger ses enfants d’un éventuel déséquilibre dans la répartition des biens.
Les limites du choix
La loi choisie doit être celle :
- de la nationalité du testateur (au moment du décès ou de la désignation),
- ou, à défaut de choix, de sa résidence habituelle au jour du décès.
Il n’est pas possible de choisir la loi d’un pays avec lequel on n’a aucun lien de nationalité ou de résidence. Si aucun choix n’a été exprimé, la loi applicable est celle du dernier lieu de résidence habituelle du défunt, au sens du droit européen. Cela peut entraîner des effets inattendus.
Testament et succession internationale
Pourquoi rédiger un testament ?
Le testament permet de :
- choisir la loi applicable à la succession ;
- désigner ses héritiers (ou légataires) dans plusieurs pays ;
- organiser la répartition des biens.
Attention : un testament valable dans un pays peut être invalide dans un autre. Par exemple, un testament déshéritant ses enfants, valable aux États-Unis, pourrait être inapplicable en France.
Le certificat successoral européen
Créé par le règlement européen de 2012, ce certificat successoral européen permet aux héritiers ou aux légataires :
- de prouver leur qualité dans tous les pays de l’UE (hors Irlande et Danemark) ;
- de faire valoir leurs droits sans passer par une procédure locale.
Il facilite grandement la gestion des successions transfrontalières.
Quels héritiers en l’absence de testament ?
Si aucun testament n’est rédigé, c’est la loi du pays de la dernière résidence habituelle qui désignera les héritiers et fixera leurs droits.
Exemple : un Français résidant en Espagne verra ses biens répartis selon le droit espagnol, sauf s’il a précisé dans un testament vouloir l’application du droit français.
Un notaire français pour une succession internationale
Même si la loi régissant la succession n’est pas la loi française, un notaire français peut régler une succession internationale. Son rôle est d’identifier les héritiers, d’évaluer les biens, d’assurer les formalités transfrontalières et, si besoin, de faire appel à des correspondants locaux (notaires, avocats).
Le notaire veille également à la conformité du testament avec les exigences de fond et de forme, tant françaises qu’étrangères.
Dans tous les cas, choisir la loi applicable en matière successorale nécessite de bien connaître les règles civiles du pays choisi. Avant de rédiger son testament, il convient de se rapprocher de son notaire pour se faire conseiller.
Fiscalité d’une succession internationale
À quel pays paie-t-on les droits de succession ?
En principe, les droits de succession sont dus :
- dans le pays du domicile fiscal du défunt ;
- ou dans le pays où sont situés les biens transmis ;
- ou dans le pays du domicile fiscal de l’héritier, sous conditions.
Exemple : si un Français décède au Canada, avec des héritiers résidant en France, ceux-ci peuvent être redevables des droits en France si :
- ils ont vécu en France au moins six ans sur les dix dernières années ;
- ou si les biens transmis sont situés en France (article 750 ter du CGI).
La France a signé plus de 40 conventions fiscales visant à éviter les doubles impositions en matière de succession (ex. : Allemagne, Espagne, États-Unis, Suisse, etc.). Ces conventions prévalent sur la loi nationale et répartissent les compétences fiscales entre les États signataires.
Bon à savoir : un legs consenti à une fondation reconnue d’utilité publique, comme la Fondation de France, est exonéré de droits de succession, même dans le cadre d’une succession internationale.
Réserve héréditaire et protection des enfants
Certains pays (Royaume-Uni, États-Unis…) ne reconnaissent pas la réserve héréditaire qui protège automatiquement les enfants ou le conjoint survivant.
Depuis le 1er novembre 2021, un mécanisme de prélèvement compensatoire permet de restaurer l’équité :
- si la succession comprend des biens situés en France ;
- et que les enfants ont été lésés ;
- alors, ils peuvent obtenir un complément d’héritage équivalent à ce qu’ils auraient reçu en droit français.
Bien anticiper sa succession internationale
- Anticiper la transmission en consultant un notaire compétent en droit international.
- Rédiger un testament clair et conforme à la législation du pays concerné.
- Choisir la loi applicable pour éviter les conflits de normes.
- Vérifier l’impact des conventions fiscales bilatérales.
- Prendre en compte la fiscalité dans chaque pays.
- Informer ses héritiers et conserver les documents dans un lieu accessible.
- Penser à actualiser ses volontés en cas de changement de pays de résidence.
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